Il y a quelques années, une discussion que j’imaginais anodine avec un ami DRH m’a amené à me poser des questions fondamentales sur le regard que je pouvais poser sur le coaching. Le coaching relevait-il immanquablement de la «câlinothérapie», palliatif finalement dérisoire au regard des difficultés vécues dans l’entreprise ou était-il possible de ré-envisager totalement l’approche et la représentation de ce métier ?
Dans un contexte de mutations accélérées des entreprises, j’ai longtemps considéré que le coaching pouvait être un excellent outil pour permettre aux acteurs des ressources humaines de pallier l’incapacité des organisations à accompagner les managers et dirigeants dans les difficultés qu’ils rencontrent au quotidien. C’était en tout cas l’idée que je m’en faisais jusqu’à une conversation déroutante, à l’été 2008, au bord de l’eau avec Jérôme, un ami DRH qui a toujours eu la sagesse de ne jamais me confier de mission…
Tandis que nous achevions de parler de son changement de poste à la rentrée suivante, nous assistions à un phénomène étonnant : le soleil se couchait à l’horizon et la lune se levait à l’opposé. Au cœur de ce mouvement de balancier, la conversation s’engagea dans un mouvement de bascule : ma représentation du coaching devait en prendre un coup !
Un dialogue en toute amitié
- Alors Arnaud, et le coaching ? Comment ça va ?
Face à une question aussi vague, je reste toujours perplexe. Je n’allais quand même pas lui dire
que tout allait bien, que les clients pleuvaient et que j’attendais la fin de l’année pour
m’acheter une Ferrari rouge décapotable !
- Ça va… j’ai eu de beaux coachings d’équipe récemment. Mais tu sais, l’année n’est jamais
gagnée
quand on est indépendant !
- Arrête ! Je sais bien que vous vivez tous au crochet des entreprises comme les psychanalystes
aux crochets de la misère psychique !
- Qu’est-ce que tu veux dire ?
- Le coaching ? C’est le crack du manager moyen… Tu vois, si le coaching se développe autant,
c’est parce que les organisations sont incapables de gérer les souffrances qu’elles génèrent.
Alors elles achètent du baume pour les bobos !
- Les bobos ?! Tous les managers ne sont pas des bobos!
- Non ! Des pansements pour les blessures !
Mon agacement commençant à pointer, j’embrayais un peu sec :
- C’est déjà ça ! Vu que vous n’êtes pas capables de rendre vos salariés heureux au travail…
- Hé, tout doux ! Vous êtes quand même des pansements de qualité ! Au prix où l’on vous paye !
Mais ce n’est pas pour autant que nous attendons de la « câlinothérapie » de votre part !
- Quoi ? De la « câlinothérapie » ?
- Oui, du développement personnel, quoi ! Tu sais, c’est très bien que vous aidiez les personnes
à se déployer, à trouver leurs marques, à gagner l’estime d’elles-mêmes... Mais franchement,
ce n’est pas à l’entreprise de payer pour cela. Le besoin des « boîtes », c’est que les
problèmes
relationnels soient résolus pour permettre aux collaborateurs de se donner pleinement dans leur
job !
Le coaching en fauteuil club, faut que ça cesse !
- En fauteuil club ?!... Bon, à supposer que nous fassions de la « câlinothérapie », vous avez
quand
même tendance à nous encourager dans cette voie ! Et ce au nom de la bienveillance, des risques
psychosociaux
et du « pas de vague » généralisé !
- Pas faux, pas faux... Je pense qu’en effet, nous pouvons considérer que nous sommes complices
!
Mais nous, on n’y peut rien. La loi, c’est la loi !
- Elle a bon dos, la loi !
- Et puis on se retrouve souvent pris dans des injonctions paradoxales du type :
« Innovez et contrôlez tout » ou encore « Accompagnez le changement et maintenez l’ordre social
».
- Alors on fait comment ?
- Moi, je sais pas ! Je change de job !
De la perplexité à la complexité
Pendant quelque temps, je me suis demandé si notre conversation n’avait pas tourné à
l’emballement
de deux vieux copains qui avaient un peu abusé du rosé estival... Je restais particulièrement
perplexe.
Même si je savais que ce que disait mon ami n’engageait pas tous les DRH de la terre,
je sentais que son propos venait chatouiller une intuition chez moi.
Six mois plus tard, via Caroline, une de mes clientes, je tombais dans le paradigme systémique à
travers la finesse d’analyse d’un Malarewicz. Un monde s’ouvrait à moi : Morin, Rosnay, le monde
de
Palo Alto avec Bateson, Watzlawicz, Weakland, Fisch et enfin Wittezaele et sa bande de
l’Institut
Gregory Bateson, sans compter la puissance d’un Nardone. Mais ce qui me subjugua le plus dans ce
nouveau monde, ce furent les gestes techniques que j’apprenais de géants comme Erickson,
Don Jackson et bien d’autres moins connus et plus contemporains. Je découvris que
l’accompagnement
était l’art d’amener l’autre à changer sa représentation du monde via un processus stratégique
itératif qui utilisait la compétence du client à échouer. Bref, j’apprenais l’aïkido sans le
savoir !
Une nouvelle représentation du métier de coach
Je me passionnais alors pour cette approche si particulière que nombre de mes camarades coaches
regardaient avec circonspection parce qu’elle va à l’encontre d’idées bien établies sur le
coaching.
Bien sûr, n’en parlez à personne, mais laissez-moi partager avec vous deux spécificités de
l’approche
systémique qui me semblent fondamentales.
Au lieu d’étiqueter les personnes à travers des indicateurs de personnalité, le coach va se
focaliser
sur les relations qu’entretient son client avec son environnement. En effet, l’approche
systémique
considère que ce ne sont pas les personnes qui dysfonctionnent mais les relations induites par
un
contexte donné. Cette précision est majeure, car c’est elle qui permet de favoriser un
changement.
C’est dans la relation que la personne peut se responsabiliser et, par voie de conséquence,
retrouver de la marge de manœuvre. L’approche systémique est une éthique de la responsabilité.
Au lieu de fonder son efficacité sur la prise de conscience via l’explication d’outils ou la
connaissance de théories sur l’Humain, l’approche systémique prône la nécessité de faire vivre
une
expérience émotionnelle qui puisse corriger la représentation dissonante du client face à son
environnement extérieur. Dit plus simplement, si un manager ne délègue pas, ce n’est pas la
prise
de conscience de son manque de confiance envers ses collaborateurs qui va l’aider à changer de
comportement, mais c’est l’expérience émotionnelle qu’il va vivre de son manque de confiance
envers moi,
en séance, ou envers d’autres dans son environnement. L’approche systémique est une technique de
résolution de problème par l’expérience.
Et alors ?
Alors, je me suis dit qu’il n’y avait pas un métier de coach mais des métiers de coach. Pour permettre à mes
clients de sortir de leur impasse, de résoudre leur problème, d’acquérir une souplesse relationnelle dans
leur environnement professionnel, il fallait innover : une réactivité dès l’apparition du problème, des
temps courts d’intervention, un processus de travail éprouvé et efficace...
Everswing est alors venu répondre au besoin de mon ami Jérôme et de tous ceux pour qui notre conversation
résonne ! Everswing vient réinventer nos métiers, explorer de nouvelles solutions créatives, dissoudre les
problèmes et contribuer à des transformations positives pour les personnes et les organisations. Vaste
ambition ! C’est avec humilité que nous mettons notre enthousiasme au service de vos entreprises !
#Jérôme : surtout, continue à ne jamais faire appel à moi et gardons notre amitié pour refaire le monde au bord de l’eau !
Image : Chantons sous la pluie / Singing in the Rain - Stanley Donen, Gene Kelly